Le film en lui-même est un peu moins bien...

Note globale


...mais le making-of rattrape le coup !

Editeur : Warner
Durée totale : 3 h 56

- (UK)

Image        PAL

2 CDs audios de 2 h 37 remasterisés
Commentaire audio de Forman et Schaffer (non st)
Making-of (16/9 st fr uk)
Bande-annonce (16/9 2 min non st mais excellente)

La restauration est une merveille. Les couleurs n'ont pas changé, elles ne pètent pas inutilement, mais la définition, presque toujours irréprochable chez Warner, est ici brillantissime. Plus qu'agréable : beau. Vous avez eu raison d'acheter un lecteur DVD.
La musique n'est pas plus ample qu'avant mais encore plus précise. Mais on notera des sifflements qui n'étaient pas dans l'original, ainsi bien sûr qu'une VF différente, quoi que pas mauvaise. Note punitive, quoi. J'aime taper.
Les immenses qualités du film original sont toujours présentes, mais elles sont quelque peu noyées avec cette version longue qui du coup le devient trop (longue). Moins bon que la version de 84 mais ses défauts ne doivent pas vous empêcher d'apprécier ce film, si vous n'avez pas le choix.
Le commentaire audio est non sous-titré et franchement pas éblouissant. Mais vous avez deux CDs remplis à ras d'un best-of du compositeur parmi les meilleurs qui soient, et un documentaire d'une heure digne de ce que Warner propose habituellement, c.a.d. indispensable.

La mode actuelle étant aux versions longues, on peut craindre les pires débordements. Déjà, que des Seigneur des Anneaux ou des Danse avec les Loups atteignent allègrement les 3h45 alors même qu'ils sont déjà un peu longs, c'est ennuyeux, mais depuis on a vu des versions longues d'un peu tout. C'est à la mode. C'est fashion. Et c'est à triple tranchant : le film devient encore plus génial (Podium, Abyss), se voit ajouter des éléments sans déséquilibrer le montage original (JFK, Aliens), ou est simplement trop long. Malheureusement, et on pouvait le deviner dès avoir vu l'affiche dans les murs de Paris lors de la ressortie, Amadeus tombe dans le troisième cas; pas de haut, il ne se fait pas mal, mais il a chû. Chiotte. Choyé ? Chiant ? Charleville-Mézières ? Pour nous intéresser de plus près au cas Amadeus version longue, voyons, version cauchemardesque (dans les deux sens du terme), son homologue dans le joli catalogue Warner Video : L'Exorciste.
Il était une fois un film hollywoodien hors-normes, qui a pulvérisé les records du box-office, qui a subjugué les spectateurs, et qui encore maintenant fait figure de légende dans le monde du cinéma. Je parle de l'Exorciste. Remarquez que ça pourrait parler d'Amadeus aussi sans problèmes. Bref, à la sortie des premiers lecteurs de DVD, Warner sort un premier DVD de ce film flamboyant. Le succès est au rendez-vous et les premiers exemplaires sont rapidement mis à sac. C'est alors que, sous l'impulsion dont on ne sait d'où elle a sorti son groin immonde, William Friedkin, réalisateur, et William Blatty, scénariste, décident de ressortir le film culte dans une version "remodelée". Le résultat, on l'a vu : au départ, c'était un chef-d'oeuvre absolu du film de terreur. C'est devenu un mauvais épisode de Columbo. Et croyez-moi, les mauvais épisodes de Columbo, ils sont très rares. Ils sont donc d'autant plus grâtinés. Pour combler d'horreur les fans (pas l'horreur cinématographique, hein), la version française, totalement mythique, de l'original a été refaite par des doubleurs de série Z dignes d'un doublage turc de Julie Lescaut. Et bien évidemment, le DVD du film original est désormais totalement introuvable et revendu à prix de platine. Amadeus, même combat ou presque. La VF reprend Luq Hamet (qui a dû s'emmerder comme un rat mort pour refaire un doublage identique), mais globalement tout est moins bon en VF. En VO, voir le paragraphe suivant. Seulement, pour en revenir à l'Exorciste, Warner a su rattraper le contre-coup, comme pour se faire pardonner, en proposant un making-of de 60 minutes de l'Exorciste proprement fabuleux.
Amadeus, kif-kif bourricot. La version ainsi rallongée ne possède presqu'aucune scène supplémentaire mauvaise. Les acteurs sont toujours bons, les décors aussi, la musique itou (encore qu'elle soit le parent pauvre de ces ajouts), mais le problème, c'est que 99% de ces plans de plus ne sont que des réalisations visuelles de tout ce que le spectateur devinait par le truchement des ellipses dans l'exquise et définitive version originale. Le fait que Mozart ait sauté la protégée de Salieri, le fait que Constance était prête à... disons faire match nul, le fait qu'à la fin de sa carrière Mozart était un alcoolique notoire prêt à toutes les bassesses, tout celà est parfaitement clair dans la version 1984, et le montrer est une sorte d'insulte à l'intelligence du public massif qui a plébiscité le premier montage, qui l'a vu et revu, et qui l'a racheté en DVD sans l'ombre d'une hésitation. Pour ceux, ô pauvres hères ! qui n'ont pas eu la chance d'être touchés par la grâce depuis 84, voir ce film est toujours une très belle expérience, tant les acteurs sont fabuleux, la musique importante et certaines scènes simplement parfaites, mais ces scènes rajoutées transforment un grand chef-d'oeuvre du 7ème art en... biographie d'un compositeur classique, ce qui est très exactement ce que Milos Forman voulait éviter, comme il le dit lui-même dans le documentaire.
Le documentaire, tiens, passons à lui. Ce qui sauvait l'Exorciste version bênets, c'était soixante minutes d'un making-of comme presque seul Warner sait nous en offrir : tout le monde parle, longtemps, beaucoup, sans langue de bois, les méchancetés fusent et le tournage du film est passé à la moulinette comme rarement. Pour Amadeus, il était impensable que cet éditeur digne d'éloges à quelques égards dont celui-là ne propose pas ce qu'il fallait comme il le fallait. Bingo, nous avons presque tous les acteurs (dont Jeffrey Jones qui ressemble à une tomate) parlant avec tendresse mais aussi parfois mordant d'un tournage épique. Notamment Milos Forman qui dresse en soixante minutes un portrait pas particulièrement élogieux du régime communiste (régime sans selle puisqu'il a quitté sa chaise dans les années 70). Un making-of comme on les aime, à savoir "à postériori", ce qui permet à tout un chacun de s'exprimer librement sans les contraintes de la production et sans peur pour sa carrière. Un making-of Warner, ce qui devrait devenir prochainement un label de qualité certifié. Vous avez aussi un commentaire audio et bon, là, j'avoue l'avoir écouté en dents de scie : non seulement il n'est pas sous-titré (là aussi c'est certifié Warner, et depuis le début, bref), mais les deux protagonistes ne sont pas là pour commenter techniquement le film : ils sont là pour revoir le montage, comme s'ils n'en étaient pas sûrs (il y a de nombreuses plages de silence, et Forman passe son temps sur les scènes rajoutées à se justifier du pourquoi du rajout : raté !), et quand ils parlent c'est surtout pour ressasser de vieilles anecdotes très personnelles. Quand on sait que les deux hommes ne sont pas les meilleurs amis du monde, bien que très proches, c'est encore plus dommage.

Comment enfin ne pas terminer cette chronique par quelques détails qui réhaussent le tout ? D'abord, la bande-annonce : ah ! à l'époque, on savait en faire, des bandes-annonces ! Elle est presque aussi proche de la perfection que possible : on voit énormément de choses, mais jamais l'essentiel, on est happés par une vision du film qui n'est ni la bonne ni incongrue, bref ca donne envie de voir sans spoiler quoi que ce soit, le tout en en foutant tout de même plein la gueule. Ensuite, la version vraiment collector, celle qui est assez épaisse, présente le remaster de la version révisée des deux CDs de la bande originale de. Si toi y'en a pas comprendre : ça est best-of Mozart, ça certifié, ça beau (et fiche coup de pied au cul par la même occasion). Enfin, l'image. Ah ! Les joies du remaster ! Si l'original était très agréable sans pour autant être parfait, le remaster propose une image indécente, à la clarté somptueuse, et surtout sans le moindre défaut apparent. C'est bien évidemment dû à la ressortie en salles de ce nouveau montage, ressortie couronnée d'un succès moyen tendance bon (on rentre dans ses frais sans redevenir millionnaire, c'est bien fait, fallait pas acheter EuroTunnel). En fait, ressortir les films classiques en salles et en profiter pour nettoyer la bande son et l'image pour que ça vaille le coup, je n'ai rien contre. Mais par pitié, arrêtez de triturer les montages dans tous les sens. Dans les années 80, on savait monter un film. De nos jours, on sait surtout les démonter. Entre temps, le montage virtuel est apparu. Et c'est une des meilleures inventions de ces trente dernières années, je ne plaisante pas. Seulement c'est comme l'atome : entre de mauvaises mains, si tout un tas de lèche-culs se contentent d'opiner du sur-chef pour garder leur poste de sous-chefaillon, forcément ça pète. Mozart n'aurait sûrement pas apprécié cet état d'esprit. Et pire, Saliéri non plus.