Un maximum de groove, un contact public toujours parfait, un public parfait aussi d'ailleurs

Note globale


Une image très décevante, les speeches de Fish coupés, la voix qui commence à dérailler

Editeur : Chocolate Frog
Durée totale : 3 h 09

Image        PAL

Galerie de croquis (10)
Documentaire sur la tournée (30 min non st)
Interview sur l'album Sunsets (52 min non st)

Un 16/9 qui part d'excellentes intentions mais a été transféré n'importe comment : couleurs baveuses et pâles, définition très hésitante, pliures, effets retard, toute la panoplie de Zerro. Heureusement le montage est assez agréable, premier titre mis à part (on va dire qu'ils s'échauffaient).
Une stereo chiche mais qui se bonifie avec la durée. De solides basses et la voix correctement mixée ce qui est un sacré challenge. Le public est très honnêment mis en avant et le côté pluvieux ressort parfois, même si un 5.1 aurait achevé de rendre ce live mythique.
Un concert clairement divisé en deux (une partie groove, une partie émotionnelle), une grande présence scénique, un chanteur qui rencontre ses extrêmes limites mais est porté par un public fantastique et des conditions météo hallucinantes.
Un making-of qui est moins chiant que d'habitude grâce à Simmonds et aux problèmes de Fish (c'est cruel mais c'est vrai que ça nous passionne) et une interview complète et franche. Gros point noir : aucun sous-titre malgré un accent quasi-incompréhensible.

Nombre d'entre vous seront intrigués de voir ce live de Fish, ancien chanteur du groupe phare de néo-progressif Marillion, classé dans la catégorie rock. Et encore, vous pouvez vous estimer heureux de ne pas l'avoir trouvé à la page funk / r'n'b. Car c'était vraiment limite. En effet, pendant les 40 premières minutes, Fish se concentre principalement sur son album d'alors, l'excellentissime Sunsets on Empire, et pendant ces 40 mêmes minutes, nous avons devant nous Jamiroquai. Un Jay K qui aurait pris 70 kilos et 35 centimètres, mais qui chante, bouge et scande presque pareil. Avec une basse bien, lourdement mise en avant. Un groove qui ferait taper du pied à Bob Roberts. Rien, mais alors rien de "progressif" au niveau du son. Niveau recherche oui, mais niveau son, sincèrement, passez ces 40 minutes à un amateur de funk, disco, r'n'b, hip-hop old school, et il se déhanchera. Et vous avec.
Vocalement, Fish a un souci. On le sait depuis des années mais ce concert-ci, donné dans des conditions dantesques comme on le verra plus loin, est le début de la fin, et certaines parties sont plus fausses qu'une facture de Deferre. Cette tournée l'a achevé et d'ailleurs on peut le voir pendant les bonus fumer clope sur clope : c'est peut-être la raison ? En tous cas, si vous recherchez l'excellence vocale, vous allez au-devant de cruelles désillusions. La voix haute, pour lui, c'est fini, il n'arrive plus qu'à gueuler avec plus de férocité que de justesse ; il est ainsi obligé de diriger sa voix vers une orientation blues de plus en plus prononcée, à la Bernie Bonvoisin (il commence à lui ressembler, d'ailleurs) et sa musique s'en ressentira les albums suivants. Bienheureusement, le charisme de notre Fish est ailleurs, dans la communion qu'il crée avec son public tel un imposant évèque du groove, et malgré les conditions extrêmes, il continue de haranguer la foule comme au bon vieux temps, d'électriser ses fidèles. Pourtant, l'électricité, c'est bien une chose dont il se serait passé : au début de ce concert, donné contre toute attente en extérieur, devant une foule Polonaise assez nombreuse et surtout jeune, il fait froid, brumeux, et il broussine. Au bout de 45 minutes, il se met à tomber des cordes, et ça n'arrêtera pas, terminant tout le concert sous des trombes d'eau - même le groupe est éclaboussé vu que le vent se met aussi de la partie. Que fait le public ? Il reste ! Il continue de chanter, de danser, rien ne les arrête ! Braves Polonais, qui poussent au cul notre gaillard de chanteur (qui les remercie d'ailleurs) et fait de ce concert un happening inoubliable pour ceux qui y étaient, et du coup on a ici un DVD marquant car le groove entraînant + le public conquis = résultat garanti.
Notre Fish ne serait rien cependant sans ses musiciens... et là on a droit à une mini-classe bienvenue. A la basse, Vantsis a le droit de gueuler. On ne le voit jamais. Jamais. Mais alors, on l'entend, et pas qu'un peu : le son a beau être en simple stéréo, il est plutôt clair (il est même assez bon vu les conditions épouvantables) et il supporte les 40 premières minutes comme Atlas portait le monde. Le batteur Dave Stewart (aucun lien de parenté) est solide, sans pour autant être époustouflant, il se combine bien avec Vantsis. Le guitariste n'est autre que Robin Boult et non seulement il est le troisième guitariste de la tournée (Keith 'Arena' More étant le premier), mais en plus il n'est pas accompagné de son habituel et fidèle Frank Usher. Il est donc unique guitariste et c'est assez intéressant car ça permet aux chansons de respirer, manque de 6 cordes oblige, et en plus le gars se permet sur les derniers titres des solos insolents de feeling (même s'il loupe affreusement certaines notes à force d'étirer ses solos à outrance). Et puis surtout, avant tout, il y a Mickey Simmonds, un jeune claviériste un peu foufou, qui est complètement incroyable : il a une patate pas permise, il a bon goût, il fait tout, dans tous les sens, il se permet aussi d'être sobre par moments, et en plus, c'est un détail mais il ressemble comme deux gouttes d'eau à... Steve Hogarth !!!! C'est rigolo surtout pour une tournée de Fish, mais en tous cas le gars que je ne connaissais que de nom depuis une quinzaine d'années ne m'a pas déçu : il est tout simplement excellent.
Et d'ailleurs il n'y a pas que sur scène qu'il soit excellent : en backstage, le petit lutin est simplement intenable ! Il balance d'ignobles blagues de cul plus vite que son ombre, et le pire c'est que dans sa cruelle déchéance il entraîne avec lui le géant de chanteur qu'est Fish. Chanteur et producteur, qui a du mal, beaucoup, beaucoup de mal à gérer : les quantités d'alcool, l'hygiène, le manque flagrant de sommeil, le peu d'argent rentrant, le nombre ridiculement élevé de dates, le changement de guitaristes (la tournée a débuté avec Keith More, détail amusant : Fish cite tous les groupes dont il a fait partie, sauf Arena comme par hasard !), le manque de maisons de disques, la promo soit inexistante, soit un peu trop ambitieuse (Allemagne), et bien sûr sa voix qui lui échappe de plus en plus, et à l'époque il ne pensait pas que ce serait définitif. On a donc droit à deux bonus non sous-titrés, hélas car le père Fish est im-bi-table (j'ai eu du mal à comprendre 60% des bonus, je l'avoue), et si le premier est, vous l'aurez compris, un roadmovie sur la tournée 97, l'autre est une interview avec le géant écossais qui revient sur l'album Sunsets on Empire. Et autant Fish a la dent dure contre beaucoup de monde, autant il ne tarit pas d'éloges envers Steven Wilson, dont il loue le sens du groove, la qualité de producteur et le poussage au cul qui a permis au Poisson de délivrer son second meilleur album. On trouve beaucoup d'anecdotes croustillantes et, si vous avez détesté Bowling for Columbine pour sa vision manichéenne méchants Américains / gentils Canadiens, vous aurez ici un dossier supplémentaire à apporter à l'affaire. A crever de rire. Avec le recul, bien sûr. Et si vous vous inquiétez pour la santé de Derek, vous avez ici une flagrante réponse : en 2002, environ 20 cigarettes en 52 minutes.

Reste un gros point noir surtout quand on a pu mener de main de maître un concert aussi difficile : l'image. Elle est en 16/9e mais elle est catastrophique, sur bien des points ! Si la réalisation pas terrible au début devient de plus en plus agréable, n'oubliant pas les plans de la foule sous l'orage et se focalisant sur Boult quand il faut, on ne peut pas en dire autant de la qualité. Le grain est affreux, la définition bourrée de défauts et tellement mauvaise que beaucoup de parties semblent floues, la compression déconne, il y a d'horribles pliures de bande et par moments un gros effet retard, bref l'image est vraiment très peu agréable, impression corroborée quand on sait que le DVD ne fait qu'à peine 3,7 Go. Si le son est correct, son homologue visuel n'est absolument pas à la hauteur et vous fera perdre une partie du plaisir, surtout que le côté "crade" aurait dû accentuer les conditions météo mais ne font que le contraire. En outre, les speeches entre chaque chanson, qui sont pourtant la force principale de ce grand chanteur, sont coupés, faisant perdre au concert ce qui le rapproche d'une véritable réunion liturgique. Mais on ne va quand même pas passer à côté de ce concert où non seulement la première partie est fantastique de chaleur, mais en plus, j'ai gardé le meilleur pour la fin, les trois ballades Family Business, Cliché et Gentleman, sont ultra-poignantes et vont vous monter de jolies larmes aux noenoeils. Danser et chialer, c'est tout ce qu'on demande au Géant Vert du prog. Oups. Pardon. Du funk. C'est dur de s'y mettre mais vous verrez, c'est pas si compliqué.

10 octobre 1997 - Przemyls (Pologne)


01. The perception of Johnny Punter
02. What colour is God ?
03. Goldfish and clowns
04. Mr 1470
05. Brother 52
06. Jungle ride
07. Medley
08. Family business
09. Cliché
10. Lucky
11. Internal exile / The company
12. A gentleman's excuse me
13. Lavender


Fish - Chant   
   Robin Boult - Guitare, choeurs
Mickey Simmonds - Claviers, choeurs   
   Dave Stewart - Batterie
Steve Vantsis - Basse, choeurs