Concert très agréable à regarder, public chaud, beaucoup de chansons magnifiquement écrites

Note globale


(8 si vous ne connaissez RHCP que depuis peu)


Un peu trop pop et pas assez funk, très décevant côté groove et mixage de la basse

Editeur : Warner Music Vision
Durée totale : 2 h 15

 - -

Image        PAL

Rétroprojections de 6 titres (28 min)
"TV screensaver" (la même chose... mais muet)

C'est une note un peu punitive à cause de la compression excessive et des effets parfois too much. Mais ce DVD est un régal des yeux, les couleurs sont exceptionelles, le décor fabuleux, le montage souvent parfait. A mon humble avis, en Blu-Ray il devrait tuer sa maman.
Dieu que c'est dur de noter ces pistes sonores. Sur le principe, ça ne mérite qu'à peine la moyenne tant la basse est médiocrement restituée. Mais la réverb de Frusciante, le public en transe, la batterie magnifique, tout ça remonte diantrement le niveau.
Ca manque pas mal de vieux albums, notamment le pauvre Mother's Milk. Mais si vous cherchiez à savoir quels étaient ces fameux singles dont les Red Hot ont récemment inondé les radios, vous les trouverez tous ici.
6 rétroprojections. Evidemment, comme vous n'avez pas trois écrans géants dans votre jardin, l'intérêt est moindre.

Métamorphose, n.f. : action de changer de forme, d'altérer ses traits, de devenir plus ou moins méconnaissable. Il n'est marqué nulle part qu'il s'agisse d'égo, d'argent ou autre : la métamorphose est un processus naturel. Mais il arrive que des gens préfèrent les chenilles aux papillons. Ce live des fameux Red Hot, enregistré sur le site magnifique du Slane Castle en Irlande devant un public de 80.000 personnes, est un des plus fameux - et vendus - DVD du genre, et fût enregistré à un moment où le groupe entamait le dernier col du sommet vers sa gloire. Mais il serait vain de nier que RHCP a mué. L'album précédent, Californication, et plus encore celui défendu ici, By the Way, ont marqué un changement de ton (et également de public) qui ne peut passer inaperçu. De groupe furieux mélangeant funk, rap et metal, il est devenu la coqueluche des radios de rock adulte mélodique. Et si la setlist présente ici en est une vibrante preuve, le constat s'étend jusqu'aux fondements du groupe.
Devant une telle marée humaine, hurlante, piaillante, dansante et surtout très jeune, de l'enquillement de tube est à préconiser, et c'est exactement ce à quoi vont s'atteler nos quatre piments rouges : Way, Scar, World, Californication, Television, le premier constat est positif pour les nouvelles chansons qui sont de petites merveilles de rock mélodique. Des riffs simples, des refrains super-entraînants, et à la batterie un Chad Smith mixé assez fort et totalement imperturbable. Mais les Red Hot, ce n'était pas que ça, et rapidement, sans qu'une quelconque lassitude ne s'invite (le concert passe comme une lettre à la Poste hors-grève), on se demande d'où vient la réputation de bad boys du groupe, et leur légendaire domination scénique.
Dans le détail, outre la présence trop chiche de vieux morceaux, on se rend compte que Red Hot ayant changé sa façon d'écrire des chansons, il ne peut plus continuer à les jouer sans se... métamorphoser. Anthony Kiedis est beaucoup moins virulent qu'avant, plus mélodique, et si sa voix est souvent magnifique, il lui arrive de coincer jusqu'à la rupture totale (hélas au plus mauvais moment : celui qui annonçait à deux secondes près le décollage du concert vers la stratosphère). Les arrangements nécessitant bien plus de finesse et (paradoxalement) d'expansivité qu'avant, le pauvre John Frusciante se retrouve à tout faire tout seul - du coup, chacun de ses pains, en guitare solo, en chant ou en choeur, prend des proportions dramatiques. Le groupe manque cruellement d'un second guitariste et d'un choriste supplémentaire pour atteindre son plein potentiel, et si ça bouge dans tous les sens sur scène (un festival simiesque), certains regretteront de ne pas retrouver l'énorme son des disques studios (même sans brickwall). Et le responsable serait...
Flea. C'est clairement lui le maillon faible du groupe, et là je peux déjà sentir les yeux de centaines de lecteurs s'écarquiller. Flea ! Le bassiste de l'enfer ! Le leader musical du groupe ! L'homme par qui la sueur et le sperme arrivent par gallons entiers ! Flea, bassiste de funk débordant de force et de folie, qui se retrouve ici obligé d'être bassiste de adult rock. Le résultat n'est pas convaincant, mais il n'est pas seul responsable : le mix lui a joué un sale tour de cochon, et notre pauvre bassiste est presqu'inaudible pendant tout le concert ! Inaudible dans le sens où on ne l'entend pas, mais surtout où on ne le sent pas. Pourtant il ne renâcle pas à la besogne, headbangue comme un fou et joue des trilliouses de notes, mais rien n'y fait. Il joue souvent trop haut, pour épauler les riffs de Frusciante - donc plus de vraies basses... lesquelles sont de toutes façons noyées dans un mixage saturé hyper-faiblard qui mange toutes les attaques de notes. Coincé entre sa vraie nature et ses obligations contractuelles de bassiste star millionnaire, il faut attendre 57, oui, cinquante-sept minutes (!) pour le voir jouer son premier slap, et on ne l'entend même pas. Un massacre ? Presque, en tous cas un immense gâchis...
Et pourtant, si le constat dressé semble négatif, c'est bien le nombre impressionnant de superbes chansons qui fait office de ciment, et qui fait tenir le spectateur jusqu'au bout sans ennui. Car que vous soyez fan des RHCP ou juste casual listener (yeah man), il y a de fortes chances que vous connaissiez et appréciiez une grande partie du répertoire joué ici. En tous cas, le public le connaît, lui, et ne se prive pas de le hurler à pleins poumons. Ce qui n'empêchera pas le groupe de finir sur deux tubes légendaires certes, mais aussi sur dix dernières minutes qui ressemblent bien plus à ce que l'on connaissait d'eux. La preuve : on y entend Flea ! (...et il slappe !). Avec un début de jam qui entame une solide érection chez l'auditeur... avant que le groupe ne la tue dans l'oeuf, comme s'ils avaient osé mettre un pied derrière une frontière interdite puis l'avaient prestement retiré. Des regrets ? Devant la bonne humeur et le professionnalisme déployés, difficile de faire la fine bouche, mais on ne pourra s'empêcher de se demander où est l'urgence, le côté moîte, et surtout, bordel, où est passé le groove ? Prenez la chanson Paradise du groupe français Hauteville : vous avez plus de groove dedans que dans 90% de ce live. Et pourtant, au départ, on parle des Red Hot. Le groupe qui fait passer Extreme pour un essai didactique de William Sheller. Donc il faudra s'y faire, un papillon sait parfaitement voler, mais n'arrivera plus jamais à ramper et rentrer dans tous les interstices : c'est ça, la métamorphose. Kafkan nanafout ?
Pour beaucoup, rien. Défauts ou pas, c'est un bien joli DVD que l'on a ici, et particulièrement sur l'image. Si la compression souffre beaucoup, on trouvera ce concert plus qu'agréable à regarder. Ce que le groupe peut manquer en punch, la réalisation le compense. Peut-être un peu trop car les faux zooms sont légion et le système de timeshift pourra vous rebuter (il est nettement meilleur que chez Motörhead), mais le montage est absolument superbe, s'attardant sur moults détails, et surtout ces couleurs, ces couleurs ! Jamais le sublime parc du Slane Castle n'aura été aussi bien filmé, largement mieux que sur le Go Home de U2. Le public infatigable, la lumière magnifique même en mode "coucher de soleil" (le principal ennemi des caméras), un régal. Le son a beau avoir un gros problème de basse, on remarquera en 5.1 les hourras du public, notamment à chaque intro de tube, et le fait que John Frusciante arrive à se frayer un chemin, pas très large mais bien là, vers vos enceintes arrières : le feedback de sa guitare, certes, mais aussi ses choeurs.

Si pour beaucoup le concert suffira, il y aura toujours les gourmands qui voudront toujours plus, et ici ils seront un peu déçus. Juste 6 clips de rétroprojection pour les écrans géants (écrans géants particulièrement planqués sur le film, d'ailleurs). Le genre de clip gentil mais tout à fait fonctionnel, à regarder une fois, surtout que certaines parties font très psychédélique. Et qu'est ce TV screensaver ci-proposé ? Alors là tenez-vous bien : ce sont les mêmes clips, mais... sans le son. C'est drôle ? Moyen, certes ça ne prend pas beaucoup de place... mais peu n'est pas rien, et l'image en aurait bien eu besoin. En fait, de place, de basse, de musiciens, de vieilleries, il y a plein de petites choses dont ce DVD aurait eu besoin ; mais ne vous leurrez pas : si ça fait longtemps que vous n'avez pas écouté du rock adulte de qualité, vous aurez affaire ici au haut du panier, et en prime pas si connu qu'il en a l'air. Nous avons troqué un groupe d'alternatif iconique pour un groupe de rock à stades : y a-t-on perdu ? Ecoutez le refrain de Around the World : peut-être pas. Il faudra leur laisser encore un peu de temps : après tout, un papillon, c'est quand même plus joli en liberté.


26-01-2009

23 aout 2003 - Slane Castle (Irlande)


01. By the way
02. Scar tissue
03. Around the world
04. Universally speaking
05. Parallel universe
06. The zephyr song
07. Throw away your television
08. Havana affair
09. Otherside
10. Purple stain
11. Don't forget me
12. Right on time
13. Can't stop
14. Venice queen
15. Give it away
16. Californication
17. Under the bridge
18. Power of equality


Anthony Kiedis - Chant   
   Flea - Basse, trompette
John Frusciante - Guitare, chant, choeurs   
   Chad Smith - Batterie